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Ju-Jitsu
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Reportages

(Magazine «Karaté-Bushido», Paris - Reportage par Jean-Paul Maillet)

Ju-Jitsu. Les techniques du Butokukai

Autrefois le père de Stefano Surace fut initié, par deux maîtres japonais, aux techniques secrètes de JuJitsu de l’école Butokukai. Aujourd’hui maître Surace les enseigne à Paris

Au cœur de Paris, au 23 rue Jean Goujon - Paris 8e - tout près des Champs Elysées, se trouve une jolie église de noble origine, classée monument historique. Elle appartient au patriciat parisien et a été confiée depuis longtemps aux pères missionnaire catholiques italiens.

En 1988, l’historien des arts martiaux de notre magazine, Sylvain Salvini, y fit une découverte étonnante: dans la crypte de cette église, un «maître de l’ombre» s’entraînait avec une poignée de disciples, pas plus d’une dizaine, à une forme de ju-jitsu dont cet historien perçut tout de suite le très haut niveau.

Ce jujitsu était d’une efficacité foudroyante, et en même temps non violente. il n’y avait pas de tatami: tout le monde chutait sur le sol de marbre de la crypte, apparemment sans problème.

Aux questions de Sylvain Salvini, ce maître de l’ombre répondit qu’il avait appris ces techniques dès l’âge de 10 ans par son père, lui-même disciple de deux grands maîtres japonais. A la suite de circonstances très particulières, ces grands maîtres avaient confié à son père les secrets de cet art, avec le serment de ne l’enseigner à personne sauf, selon la tradition, à son fils aîné.

Ces maîtres faisaient partie d’une académie directement dépendante de l’Empereur: le Butokukai, la plus importante institution d’arts martiaux ayant jamais existé. Elle comptait dans les années 30, plus de trois millions d’adhérents, et réunissait dans son organisme le plus élevé, le Busen - sis à Kyoto, l’ancienne capitale du Japon - les grands maîtres des plus célèbres écoles d’arts martiaux japonais authentiques de l’époque.

Le mot Butokukai se traduit d’habitude par «Ecole de l’esprit guerrier », sa traduction plus correcte, sur la base de ses idéogrammes, étant au contraire significativement «Ecole de l’art d’arrêter la lance» ou plus pragmatiquement, «de l’art de défendre la paix».

Parmi ces grands maîtres, ceux du JuJitsu avaient mis au point, sur ordre de l’Empereur, une méthode dite «suprême», formée des techniques les plus efficaces des 11 écoles de ju-jitsu les plus prestigieuses alors existantes: Le reportage paru le dans la Yoshin ryu, Shiten ryu, Kiushin ryu, Miura ryu, Takeuchi ryu, Fusen ryu, Kodokan, Sekiguchi ryu, Sosui shitsu ryu et, d’une façon plus discrète, Daito ryu et Kito ryu. Cette méthode était réservée à un petit nombre d’adeptes, en général de très haut niveau social.

L’héritier

A la fin de la deuxième guerre mondiale, à la suite de la suppression forcée du Butokukai, les grands maîtres survivants réagirent en prenant la décision de ne plus enseigner leurs arts, et engagèrent dans ce serment ceux de leurs disciples encore présents. Par conséquent, les disciplines martiales japonaises authentiques de haut niveau, y compris ce JuJitsu, ont rapidement disparu. En vain plusieurs maîtres des générations suivantes, japonais et occidentaux, avaient cherché à remonter au jujitsu en partant du judo, de l’aïkido et du karaté. Noble effort, qui pourtant ne pouvait aboutir qu’à des résultats décevants malgré la valeur de certains de ces maîtres. En fait, les principes secrets de ce JuJitsu étaient bien différents de ceux des méthodes «dérivées». L’aboutissement de ces efforts fut donc des disciplines auxquelles on donna, optimistement, le nom de ju-jitsu, bien qu’elles eussent peu à voir avec celui-ci.

Enfin, à la suite d’une série de circonstances exceptionnelles, seul détenteur des secrets de cet art, et d’autres arts martiaux japonais authentiques de haut niveau, resta le père de ce maître de l’ombre, qui les transmit ensuite à son fils en l’engageant, à son tour, à ne pas les enseigner de son vivant. Ce n’est donc qu’après la mort de son père, que l’héritier se décida à enseigner à très peu de disciples, de façon très confidentielle, pour empêcher la disparition de cet art dit «suprême».
Ce maître de l’ombre, qui entraînait sa poignée de disciples dans la crypte de cette jolie église parisienne, avait évidemment un nom. il s’appelait Stefano Surace, il était né en Italie, et plus précisément en Sicile. C’était un journaliste, un écrivain et un homme hors du commun.

Sans peur et sans reproche

Le fait d’avoir été formé dès son enfance aux arts martiaux authentiques (et donc au « Bushido », l’éthique des Bushi, les samouraï nobles, la caste la plus élevée du Japon traditionnel) avait marqué profondément sa personnalité. En introduisant l’esprit Bushi dans sa profession, il considérait le journalisme comme un moyen de se battre contre tout abus. il privilégiait donc les enquêtes à risques, en commençant juste là où ses collègues «jetaient l’éponge».

Cela lui permit des «scoops» retentissants, qui entraînèrent bien des changements et des réformes en Italie, notamment en ce qui concerne les droits de l’homme, la transparence politique, la justice, les abus psychiatriques, les prisons, la police, les problèmes sociaux.

Cela fit beaucoup parler de lui, et le plaça au centre de polémiques acharnées et de procès bruyants pour des affaires de presse qui firent plusieurs fois le tour du monde. il n’était pas rare qu’on en discute officiellement, même au Parlement italien.
Tout cela l’avait gratifié d’une carrière foudroyante: il fut d’abord envoyé spécial et ensuite directeur de plusieurs hebdomadaires italiens à large diffusion tel «ABC» célèbre dans les années 60 et début 70 pour ses «scoops» retentissants, et «AZ» dont il était directeur.

L’hebdomadaire «Cronaca» tint à souligner «son courage, son incroyable sang froid, sa droiture morale, sa foi dans la fonction du journalisme, et sa charge irrésistible de sympathie de journaliste et d’homme sans peur».

Dans son activité de journaliste spécialisé dans les enquêtes à risques, ses techniques de jujitsu lui permirent de se tirer d’affaires maintes et maintes fois et de sauver sa vie. En 1975 par exemple, pendant une enquête sur les conditions de détention scandaleuses dans les prisons italiennes, il fut agressé par un commando d’hommes armés de couteaux et de matraques. il en désarma trois et tint les autres à distance, s’en tirant avec quelques coupures superficielles. Les prisonniers, témoins de cette agression contre un journaliste qui venait prendre leur défense, déclenchèrent immédiatement un mouvement de protestation en sa faveur.
Des dizaines d’anecdotes de ce style jalonnent la carrière et la vie personnelle de Stefano Surace. Véritable justicier, il fut surnommé «le corsaire du scandale », «le pirate de la plume», qualifié d’ «as légendaire du journalisme » etc... Sa vie pourrait faire l’objet d’un roman.

La valeur sociale

Le ju-jitsu Butokukai, dont maître Surace est resté le dernier et seul détenteur au monde, est le résultat d’un effort millénaire, de la part de l’humanité, visant à préserver les êtres humains de toute atteinte à leur vie, et donc à la fois des agressions extérieures (attaques physiques meurtrières avec ou sans arme) et intérieures (blocages psychologiques qui sont à l’origine de la plupart des maladies physiques et psychiques et des comportements plus ou moins violents et asociaux).

En pratiquant cet art martial «suprême», on n’apprend pas seulement, en peu de temps, à se défendre des agressions physiques avec une efficacité étonnante, mais on se libère aussi, petit à petit, de ces blocages intérieurs et de leurs conséquences. La personnalité authentique se libère dans toute sa lucidité et sa rationalité, la résistance aux maladies s’accroît, la jeunesse et la vie se prolongent...

Dans cette optique, on considère l’agresseur, même le plus dangereux, comme agissant sous l’emprise astreignante de ses blocages, dont il est lui même la victime. il n’est donc pas quelqu’un à détruire, mais à neutraliser seulement et si possible à transformer en ami. C’est pourquoi cet art martial est fondamentalement non violent.

Ce jujitsu est donc lié à une philosophie de haute valeur éthique et pratique. On peut le considérer comme une méthode très efficace pour prévenir la plupart des maladies du corps et de l’esprit, pour prolonger la jeunesse et la vie, pour améliorer les rapports sociaux. Maître Stefano Surace a commencé à faire sortir cette discipline de l’ombre pour la première fois dans l’histoire, afin qu’elle ne disparaisse pas, puisqu’il s’agit d’un patrimoine sans prix, appartenant non seulement au Japon mais à toute l’humanité, et qui plonge ses racines dans les cultures chinoise, indienne et auparavant, gréco-égyptienne (voir à ce sujet le célèbre pancrace, la discipline la plus prestigieuse des Jeux Olympiques antiques).

Maître Surace l’a fait renaître de ses cendres à Paris et a fondé, outre le jujitsu Butokukai Club de France, une fédération (la FFJJBA: Fédération Française de Ju-Jitsu Butokukai et Disciplines Assimilées) et le Butokukai institute Europe.
Le but de ces organismes, indiqué dans leurs statuts, est de «favoriser la formation psycho-physique, éthique et culturelle de la personne humaine a travers la pratique des arts martiaux authentiques, occidentaux et orientaux, et notamment ceux issus de l’ancien Butokukai (Busen) de Kyoto; en privilégiant l’équilibre intérieur, la connaissance et la maîtrise de soi, la non violence et, en général, l’épanouissement de la personnalité».

Pour souligner cela, Maître Surace, tout en acceptant la charge de président de ces organismes, appela comme président d’honneur M. Angelo Zambon, expert international reconnu et apprécié pour son travail sur les problèmes sociaux.
Principes techniques - Dans cet art, on n’utilise pas la force physique mais les forces naturelles: l’inertie et la gravité, les siennes propres et celles de l’adversaire, en les combinant de façon rationnelle. De cette façon, il peut être appliqué efficacement à des adversaires beaucoup plus forts.

il y a aussi utilisation rationnelle, à la fois de la force musculaire de l’adversaire et de ses points faibles et sensibles, ainsi que la mobilisation opportune de sa propre énergie interne, concentrée dans le « hara » (point du corps près du centre de gravité).
L’essentiel de l’efficacité est donné par des mouvements exécutés avant d’appliquer une technique: les tai sabaki polyvalents.

Leur caractéristique commune est que chacun d’eux permet de faire face a n’importe quel type d’attaque à mains nues, et à beaucoup d’attaques à l’arme blanche, et même à l’arme à feu, à distance rapprochée. On choisit l’un de ces tai sabaki avant même que l’adversaire déclenche son attaque.

Ce sont des mouvements qui donnent une grande efficacité à la défense. Les techniques ne sont qu’un complément dont on peut parfois même se passer.

La connaissance de ces mouvements avait été jusqu’ici réservée exclusivement à certains maîtres de très haut niveau (9e ou 10e dan) et soumise au secret le plus strict. Personne d’autre n’en soupçonnait même l’existence. Maître Surace a estimé nécessaire d’en révéler quelques uns, sans lesquels l’efficacité reste limitée. C’est l’un des grands apports de maître Surace à la connaissance réelle des arts martiaux authentiques.

Les techniques du jujitsu Butokukai peuvent être pratiquées sur le terrain sans échauffement préalable: on n’a pas évidemment le temps de s’échauffer en cas d’agression inattendue. Pourtant, à l’entraînement, des échauffements très sophistiqués sont pratiqués, comprenant des exercices respiratoires et énergétiques caractéristiques de cette école.

Pour le jujitsu Butokukai, une bonne technique doit présenter les caractéristiques suivantes, sans en omettre une seule:

- elle doit pouvoir être appliquée à des adversaires 5 fois plus forts que soi, sans les blesser grièvement.

- elle ne doit jamais exposer, même un instant, un point sensible de l’exécutant.
- elle doit être très difficile à contrer.

- au cas où elle échouerait, l’on doit pouvoir immédiatement enchaîner avec une autre «bonne» technique, c’est-à-dire répondant aux mêmes caractéristiques.
- elle doit être exécutée en un seul temps, celui de l’attaque de l’agresseur, au maximum en deux temps.

- elle doit pouvoir être pratiquée sans échauffement préalable, car on n’a pas le temps de s’échauffer en cas d’attaque subite.

- elle doit pouvoir être exécutée presque à n’importe quel âge.

- elle doit être très polyvalente, c’est-à-dire applicable à des situations de combat très variées.

- elle doit être pratiquée avec un esprit particulier: «l’âme du Bushi doit être comme la surface d’un lac tranquille, pour refléter fidèlement la réalité».

Jean-Paul Maillet

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